Communautaire et Conjointe de Communautaire — Demandes de titres de séjour : Intérêt à agir et bien fondée de la demande
“Sur la recevabilité :
3. Il ressort des pièces du dossier que les requérants ont sollicité la délivrance de deux cartes de séjour permanent valables respectivement dix et vingt ans et qu’il leur a été remis des cartes de séjour d’une durée d’un an. Bien que ces cartes confèrent des droits identiques à leurs titulaires, la durée de validité respectivement dix et vingt fois supérieures des documents demandés par rapport à ceux qui ont été remis aux intéressés justifie à elle seule l’intérêt à agir des requérants. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Doubs doit être écartée.
(…)
5. D’une part, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Doubs a entendu fonder ses décisions de rejet implicite de demandes de carte de séjour permanent sur l’interruption du séjour légal de M. du fait de son absence d’activité salariée entre mai 2018 et mai 2019. Cependant, les deux attestations de la caisse primaire d’assurance maladie du Doubs versées par le requérant font apparaître que M. a été placé en arrêt de travail pour une affection de longue durée du 30 avril 2018 au 31 mars 2019 et a perçu de ce fait des indemnités journalières. Cet arrêt de travail, provisoire et indépendant de la volonté du requérant, ne peut être regardé comme constituant une rupture de l’activité professionnelle entendue au sens de l’article L. 121–1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui seule aurait été susceptible d’interrompre la régularité du
séjour du requérant sur le sol français.
6. D’autre part, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Doubs a également entendu fonder les décisions attaquées au regard de l’interruption de la résidence de M. et Mme sur le territoire français au cours des cinq années précédant ses décisions. Or, il ressort des pièces du dossier que M. justifie avoir exercé une activité professionnelle sur le territoire français et ce, de façon ininterrompue entre avril 2014 et octobre 2019, mois de sa demande de carte de séjour.
En outre, si le préfet soutient que Mme, a séjourné au Maroc entre le 6 juillet et le 27 août 2015 et qu’elle a quitté le territoire français le 3 juillet 2018 sans que la date de son retour ne soit connue avec précision, il ressort toutefois des pièces du dossier que cette date ne peut qu’être antérieure au 6 novembre 2018, puisque la requérante s’est rendu à un rendez-vous médical sur le territoire français ce jour-là. Or, il résulte des dispositions précitées que la condition de résidence légale et ininterrompue en France depuis cinq années prévue par les articles L. 122–1 et L. 122–2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile n’interdit pas aux demandeurs de quitter le territoire pour des séjours d’une durée inférieure à quelques mois. La circonstance que Mme ait effectué un voyage au Maroc de moins de deux mois et un autre dont la durée n’a pas pu excéder quatre mois, au moment des vacances scolaires d’été, et alors même qu’il ressort des pièces du dossier qu’elle était suivie médicalement en France, qu’elle avait son adresse principale dans ce pays, qu’elle y bénéficiait de prestations sociales, qu’elle s’y acquittait de la taxe d’habitation, que son mari et ses enfants y résidaient, et, respectivement, y travaillaient ou y étaient scolarisés, n’est en conséquence pas de nature à constituer une rupture de sa résidence légale et ininterrompue sur le territoire de la République.
7. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les décisions par lesquelles le préfet du Doubs a implicitement refusé à M. et Mme la délivrance de cartes de séjour permanent ont méconnu les dispositions des articles L. 121–1 et R. 121–1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Ces décisions doivent par suite être annulées.” (TA de Besançon n°2000218–2000219 du 25 septembre 2020 — jugement obtenu par le Cabinet).